Il est là devant moi. Je ne l'ai pas entendu venir.
Ça fait huit jours que je viens me baigner tous les
après-midi dans ce petit coude que forme la rivière. L'eau est fraîche sans être
froide. Le peu de profondeur permet au soleil caniculaire de la chauffer. La
plage est formée par l'ancienne descente
qui permettait aux vaches de venir s'abreuver. Il n'y a plus de vaches dans la
pâture qui est maintenant un champ où poussent les maïs. Dès le deuxième jour
j'ai laissé tomber le maillot et mon corps commence à prendre une jolie couleur
ambrée.
Il me regarde, l'air goguenard. Il a le sourire en coin du
futur maquignon qui "ausculte la bête" sans rien dire. Et il ne dit
rien. Je le reconnais. C'est le fils du paysan du village. François. Il doit
avoir dans les 25 ans.
Ce que j'ai vu en premier, ce sont les chaussures de
sécurité et les chaussettes blanches style tennis. La poussière de la moisson
les recouvre d'une légère poussière grise. Il porte un short court, sans
fioriture, un short de travail, ainsi qu'un débardeur bleu marine.
Je n'ai pas esquissé le moindre geste pour me couvrir. A
quoi bon. Il doit d'épier depuis un moment sans doute.
J'ouvre la bouche pour lui demander…lui demander quoi
d'ailleurs…! Je ne pas le temps de chercher mes mots que déjà, il tourne les
talons et repart sans rien me dire.
Je saute dans la rivière pour reprendre mes esprits. Je me
rhabille et je rentre à la maison par le chemin du bois en évitant le village.